J’ai profité du cycle Miyazaki sur Arte pour revoir Totoro en entier (je n’avais pas pu voir la fin à l’époque). Comme la dernière fois, j’ai pensé à mes explorations enfantines : en vacances à la montagne, j’avais trouvé, comme la petite du film, une sorte de tunnel de buissons entremêlés, un passage secret naturel vers un lieu forcément magique et mystérieux. On revenait chaque année au même endroit en vacances, mais bizarrement, je ne l’avais plus jamais retrouvé. A moins que ce soit mon regard qui ait changé ?
C’est finalement ça, le sujet du film : une histoire de distance, d’échelle, de taille. Quand on est petit l’univers s’arrête bien avant l’horizon. Un jardin est un monde, et on ne s’étonne pas qu’un « dieu » vive justement dans l’arbre près de la maison. L’Ailleurs est à peine concevable. Les herbes hautes sont une jungle, le tunnel de buissons est à la taille de la plus petite des filles, et le père a bien du mal à s’y faufiler. Il appartient au monde tel qu’un enfant le perçoit : un monde organisé selon quelques repères géographiques, la maison, l’école, le jardin, l’arrêt de bus.
Quand les filles plantent devant la maison les graines magiques offertes par Totoro, celles-ci se transforment le temps d’une nuit en un gigantesque arbre-monde qui vient surplomber la maison tel un parapluie. Pourtant au matin, les graines n’ont réellement produit que quelques feuilles, mais la joie des petites reste aussi grande. Une histoire d’échelle encore.
Ce qui est démesuré aussi chez Totoro, c’est son sourire énorme et ses yeux qu’il ouvre parfois tout ronds. Il a l’air d’exprimer une joie muette, complètement hallucinée, provoquée par des choses aussi insignifiantes que le bruit des gouttes d’eau sur le parapluie. Un presque rien qui a l’air de l’éclater complètement, et qui lui donne un petit air du chat du Cheshire (comme le chat-bus d’ailleurs).
Les fillettes sont, elles, comme deux Alice qui changent de taille au gré des événements : après être tombées dans le tunnel-terrier, auprès de Totoro elles sont grandes, elles volent au-dessus d’un arbre géant et contemplent ce qu’elles croient être le monde entier. Mais bientôt le monde adulte les rattrape et les voilà petites, si petites : leur mère est à l’hopital et la plus jeune décide de s’y rendre. La ville est loin, trois heures de marche, et quel chemin faut-il prendre ? Évidemment elle se perd au milieu de nulle part, et finit par s’arrêter pour pleurer : le monde est désespérément trop grand pour elle.
Heureusement Totoro et le chat-bus interviendront pour abolir les distances dans un ultime changement d’échelle, et permettre une fin pleine d’espoir.
On finit tous par grandir et par pouvoir parcourir le monde à grandes enjambées. L’important est de ne jamais perdre la faculté de percevoir les tunnels et les terriers autour de soi… et de savoir apprécier le bruit des gouttes d’eau sur un parapluie. ;)
J’ai beaucoup aimé le film (mais ça fait déjà longtemps) et ton texte.
Génial ce post.
Merci à tous les deux ^^
Moi aussi je l’ai vu et j’ai bien aimé
C’était super!
Une jolie vision, et une belle analyse d’un des aspects de cette oeuvre.
J’ai pris beaucoup de plaisir à lire ces quelques lignes.
Vraiment rien à ajouter.
Ah, si : bravo et merci.
Merci à toi pour la visite et le commentaire ! :D
Zut et zut ! Je vais devoir lire du début à la fin le blog pour mon grand plaisir…Merci à toi ! Là c’est dit, c’est dans mes favoris…
^^ Bonne lecture !